
Le 16 avril dernier, coesion SP réunissait une quarantaine de penseurs-euses et d’acteurs-trices clés de l’écosystème santé et mieux-être au travail (SMET) pour une rencontre inédite : un Think Tank sur le repérage collectif de signaux faibles. L’objectif ? Prendre de l’avance, car c’est souvent dans les marges qu’émergent les transformations majeures de demain.
Cette démarche prospective s’inscrit dans un moment stratégique : celui de la transition vers une future stratégie nationale de prévention en santé, qui succédera au plan d’action PGPS. L’ambition est claire : anticiper, ensemble, les mutations à venir en matière de travail, de santé et de lien social, et nourrir une vision collective à 10 ans pour un Québec plus résilient, humain et innovant.
Des signaux faibles qui en disent long
Parmi les tendances émergentes, plusieurs préoccupations ont convergé. Voici les signaux faibles les plus marquants :
-
Technologies, IA et fracture numérique
L'enthousiasme face à l’intelligence artificielle est réel, mais masque parfois des angles morts importants. On observe :
-
Une surestimation des capacités de l’IA, sans réelle évaluation des impacts systémiques;
-
Une exclusion numérique croissante, notamment chez les aîné-e-s et les personnes vulnérables;
-
Une déconnexion entre les innovations technologiques et la capacité des milieux à les intégrer humainement, éthiquement et écologiquement;
-
Une absence de formation sur les effets de l’IA sur la santé et les compétences humaines.
- Santé mentale, charge cognitive et transformation du travail
Le télétravail, bien qu’utile, révèle son revers : isolement social, perte du lien humain, et raréfaction des interactions informelles essentielles au sentiment d’appartenance. Par ailleurs :
-
La proche aidance, bien que massive, reste encore peu reconnue en milieu de travail;
-
La précarisation invisible de travailleurs-euses âgé-e-s s’amplifie, certains vivant dans leur voiture malgré un emploi.
- Tensions sociales, culturelles et crise du lien
La jeunesse vit une anxiété généralisée, nourrie par les polycrises (environnement, IA, logement…). Les algorithmes renforcent les biais cognitifs et la polarisation, rendant difficile l’émergence d’une vérité partagée. La participation civique des jeunes est faible, alors même que les décisions actuelles auront un impact déterminant sur leur avenir.
- Leadership et culture du “nous” collectif
Les modèles actuels de leadership doivent évoluer vers plus d’humanité, d’inclusion et de performance durable. La neurodiversité des jeunes générations, qui arrivent sur le marché du travail, soulève un impératif d’adaptation des environnements. La grande question posée : Comment reconstruire un “nous” collectif dans un monde fragmenté ?
Et maintenant ?
Pour répondre à ces constats, plusieurs pistes d’action concrètes ont émergé :
- Encadrer l’usage éthique de l’IA dans les organisations;
- Offrir des programmes de requalification pour les emplois menacés;
- Former à la littératie numérique et critique dès le plus jeune âge;
- Créer plus d’espaces de dialogue intergénérationnel;
- Outiller les leaders du changement dans les milieux de travail;
- Intégrer la proche aidance et les inégalités socioéconomiques dans les politiques publiques et RH.
En conclusion, cette rencontre du Think Tank SMET marque une étape clé : celle du passage de l’observation à l’action. En repérant dès aujourd’hui les signaux faibles, nous nous donnons les moyens de bâtir un avenir plus juste, plus sain et plus solidaire pour tous-tes. Penser l’avenir de la santé globale et du bien-être du travail au Québec, c’est aussi réaffirmer notre capacité collective à choisir un cap.